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L'imaginarium de Myrtille Taff
31 mars 2018

Tragédie du quotidien : cantine #5

Plage de Trouville noir et blanc

Danser par temps gris sur du  Etienne Daho chic et entraînant, "Tombé pour la France", désespérément, en regardant la mer, retrouver cinq minutes sa jeunesse perdue. Vouloir être seul la veille de noël écouter  « Fou à lier » de   Feu ! Chatterton  dans son étroite cellule rester enfant peur de l’école, sauter  furieusement dans les flaques musique entêtante des films de Klapisch. Janvier  n’est  pas un mois magique on peut se laisser tenter par décembre,  par la fugace féerie des illuminations dans la nuit, les souvenirs d’enfances qui  jaillissent en plein coeur

S’enfuir toute la vie, toute la vie…

Le métro monde obscur, il se perd. Il descend à la même station que d’habitude mais une fois dans la rame, iI ne reconnaît plus sa ligne inscrite sur le tableau. Comment un itinéraire  a-t-il  pu changer dans la nuit ? Pourtant, il s’est abonné aux alertes et aux  divers comptes  de la RATP. On ne lui a rien signalé dans ce monde ultra connecté. Où peut-il bien descendre ? Sur le tableau de la ligne, il lit un nom de station qui lui évoque  quelque chose. Il va descendre à cet  arrêt, il verra bien.  Il finira bien par retrouver son chemin. Tout lui semble différent, le train dans lequel il est monté, les stations qui défilent devant lui. Il arrive à destination, il ne sait pas trop pourquoi il sort de la station. Il se retrouve dans un quartier où il n’a jamais mis les pieds, dans une ville pourtant où il vit depuis toujours, qu’il a parcourue de part en part, d’une extrémité à l’autre. Il ne voit pas de plan de quartier. L’heure tourne, il est dix heures.  Il va être en retard à son travail, instant de panique, son cœur bondit dans sa poitrine. Il cherche dans toutes les directions, il n’a plus ses repères. Il emprunte des rues qu’il croît vaguement reconnaître.  Il aperçoit un  immeuble qui lui semble familier. Ne serait-ce pas celui de son entreprise ?  Pourtant, le bâtiment est beaucoup plus grand, clinquant, flambant neuf  contrairement à son lieu de travail habituel. Il pénètre dans un hall immense et rutilant. Il prend l’ascenseur. Il se trompe de bouton, il veut aller au 5ème étage mais il appuie sur le bouton 50. L’ascenseur démarre comme une flèche, il monte de plus en plus vite. Cette fulgurante ascension lui donne le tournis. Il a peur d’avoir le vertige, une fois arrivé au point culminant. L’ascenseur se transforme en ascenseur de verre et devient transparent.  Il apercçoit la ville toute  petite sous ses pieds, OUI, il est saisi d’un vertige terrible. La porte s’ouvre sur une passerelle toute étroite, il se sent aspiré par le vide. Pris de terreur, il appuie  aussitôt sur le bouton du rez-de-chaussée.  L’ascenseur  descend à toute allure, ne s’arrête pas  à l’étage indiqué. Il s’immobilise enfin  au 3e sous sol. La porte s’ouvre, il fait tout noir, pas de lumière. L’effroi l’envahit, il a peur de faire de mauvaises rencontres dans cette épaisse obscurité. Il appuie sur un bouton au hasard.  Miraculeusement, il parvient à un étage. Il  sort. Il arrive dans un service qu’il reconnaît vaguement, le service de la communication mais il n’y a jamais travaillé…Une femme chic et au brushing parfait vient  à sa rencontre et lui dit de se dépêcher, la réunion commence dans cinq minutes. Il lui répond qu’il pose ses affaires dans son bureau et  qu'il la rejoint. Mais où peut bien êtrre son bureau ?

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 Soudain, il se rappelle qu’il devrait être en cours, il a repris les études. Cela fait plusieurs mois, qu’il n’est plus allé en cours d’espagnol.  Il n’ose plus s’y rendre, il a peur de se faire vertement réprimandé par son professeur. Comment obtenir son diplôme de fin d’études s’il ne va jamais en cours ?  La semaine dernière, il a eu une sale note à sa dissertation de français, il n’avait rien révisé. Il n’en avait pas eu le temps, débordé sans doute par d’autres occupations.  Il voudrait bien se rendre à son université mais il ne sait plus quel métro il doit prendre.  Il est distrait dans ses réflexions  par la sonnerie d’un SMS de son téléphone portable, « sa troupe de théâtre l’attend pour répéter ». Il se retrouve  projeté instanément dans une salle de théâtre. La scène est vide devant lui. Un de ses partenaires lui rappelle que la première  a lieu ce soir.  Un sentiment d’horreur le saisit, il pensait simplement  répéter aujourd’hui. On avait fait appel à lui au dernier moment pour qu'il reprenne un rôle qu’il avait interprété il y a un an, il n’est plus très sûr de son texte. D’ailleurs, il faut qu’il remette la main sur l’ouvrage sans plus attendre, si sa compagnie amateur doit jouer ce soir devant un public réel. Cependant qu’est-ce qui était  vraiment réel ?  Tout s’enchaînait  à vive allure ce jour-là  alors qu’il avait une vie tranquille et sans histoire. Il a sûrement dû laisser son texte dans les loges. En chemin,  il croise d’autres membres  de sa troupe qui l’intercepte pour lui faire essayer son costume. Il joue dans une pièce du 17e siècle. Il doit se sentir libre de ses mouvements  dans des vêtements  épais et lourds. Il s’exécute, mais ensuite il faudra vraiment qu’il relise son texte sinon, il ne sera pas prêt. Il n a que de vagues souvenirs de son personnage. Quoi l’heure de la représentation est avancée,  le spectacle commence dans cinq minutes  lui annonce un autre comparse? Au fait, il ne devait pas donner à manger à son chat et à son bébé ?  Il ne souvient plus depuis combien de temps, ils n’ont pas été nourris. Le public est là, tous les comédiens sont en coulisses, la pièce a déjà  commencé. Il doit entrer en scène dans  deux minutes, c’est quoi ces fichues répliques, déjà ? Pourtant, dans cette scène,  il n’a deux que phrases à dire mais lesquelles ?  Il faudra qu’il improvise, c’est la seule solution….C’est à lui, il entre en scène, ses partenaires s’adressent à lui,  c’est à lui  de parler ….

Eugène se réveille brutalement, il halète. Il ne sait plus il où il est. Il observe la pièce minuscule dans laquelle il dormait. Il réalise soudainement qu’il se réveille dans une cellule  de prison. Oui c’est ça. Il se rappelle, il a pris SIX mois fermes après le braquage de la cantine avec Victorine. Certes, leurs armes étaient en plastique. Certes, après avoir commis leur forfait, ils avaient finalement  balancé leur maigre butin dans le hall d'entrée. Son entreprise n’allait pas cependant se contenter d’un simple renvoi.  Eugène et Victorine avaient menacé leurs collègues avec une arme, même si celle-ci etait factice.  Is les avaient contraint à leur donner de  l’argent et leur portrfeuille. Ils avaient joué, ils avaient perdu….Eugène pouvait imaginer à présent ce que ressentait Victor emprisonné entre quatre murs étroits depuis plusieurs mois


Eugène pensait à Victorine, elle avait pris six mois fermes aussi. Il l’imaginait dans une prison pour femmes comme celle de la série, « Orange is the new black ", obligée de batailler avec la cantinière en chef pour avoir à manger....

Le métro monde obscur, elle se perd.Elle descend à la même station que d’habitude mais une fois dans la rame, eIle ne reconnaît plus sa ligne inscrite sur le tableau. Comment un itinéraire  a-t-il  pu changer dans la nuit ?.....

Victorine imaginait Eugène une serviette nouée autour de la taille, dans les douches d'une prison, en butte à la convoitise des autres détenus.

Toute  leur vie avait défilé, décousue et déformée en une nuit de cauchemar

Etienne Daho - Tombé pour la France (Clip officiel)

 

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Commentaires
B
Merci, ça me touche beaucoup, à bientôt, myrtille !
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L
Trés beau texte, très prenant, très bien écrit.<br /> <br /> Le premier paragraphe me parle particulièrement...<br /> <br /> Gros bisous Myrtille, au plaisir !
Répondre
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